A 38 ans, il avait déjà tout connu, la gloire de joueur au FC Nantes, le titre olympique comme sélectionneur et le banc des Bleus en demi-finale de Coupe du monde. Henri Michel avait, depuis 30 ans, exporté sa science du football en Afrique cependant que le football français lui tournait le dos.

Bien avant, le FC Nantes, qui fêtait ses 75 ans, l’avait célébré parmi d’autres grands anciens. Lui avait été élu « légende des légendes » par les supporteurs mais il n’était pas là, sur la pelouse de La Beaujoire, au milieu des grands anciens de Marcel-Saupin, l’enceinte des Canaris des meilleures années. C’était trois jours avant son décès un soir de lundi à Aix-en-Provence, où il avait débuté.

Le président Emmanuel Macron avait par ailleurs salué la « franchise sans arrogance », la « loyauté »et le « goût du travail bien fait » de l’ancien sélectionneur. « La discrétion et l’humilité d’Henri Michel (…) auront fait presque oublier la carrière exceptionnelle qui fut la sienne », avait souligné le président de la République dans un communiqué publié le lendemain soir. M. Macron a rappelé « sa franchise sans arrogance, sa loyauté et son goût du travail bien fait »« Malgré la dureté parfois du monde du football, il s’y était forgé de solides amitiés, de celles qui survivent aux avanies de l’histoire. La France perd un grand sportif et un homme d’une qualité morale exceptionnelle », avait ajouté le président de la République, connu pour être fan de football et de l’OM.

Avec Nantes, Henri Michel avait régné sur le football français avant l’émergence d’un autre Michel. Nantes disputait à Saint-Etienne la préférence des amateurs de football et l’on pouvait être à la fois l’un des meilleurs joueurs du pays et l’homme d’un seul club : capitaine à 22 ans, Henri Michel porta le maillot nantais de 1966 à 1982, 640 matches au total. A Marcel-Saupin, où « son » FC Nantes resta près de cinq ans invaincus (92 matches de 1976 à 1981, le record tient toujours), il remporta trois titres de champion de France (1973, 1977, 1980) et une Coupe de France (1979).

A la tête des Bleus, Guadalajara et le nul à Chypre

Plaque tournante de l’équipe, on lui prêtait le talent d’un Franz Beckenbauer et le magnétisme de Michel Platini, mais il n’eut pas la même carrière internationale. Son FC Nantes connut plus de déconvenues européennes que de succès et en équipe de France, la génération n’était pas si talentueuse. Il joua, tout de même, 58 matches sous le maillot bleu de 1967 à 1980, mais une seule Coupe du monde, en 1978.

A sa retraite de joueur, il avait vite basculé, préparant la succession de Michel Hidalgo à la tête des Bleus en prenant en charge les Espoirs le temps d’un séjour doré aux Jeux olympiques de Los Angeles en 1984. Son arrivée était écrite par le président de la Fédération, Fernand Sastre, et son prédécesseur Hidalgo, auréolé du titre de champion d’Europe. Fort de ce crédit et de sa formidable carrière de joueur, ce méridional de caractère menait les Bleus de Platini jusqu’à la victoire en Coupe intercontinentale (1985) et, surtout, en demi-finale de la Coupe du monde 1986 (défaite 2-0 contre l’Allemagne), après une victoire historique à Guadalajara contre le Brésil aux tirs au but en quart de finale.

La suite était plus complexe, sans Platini : Michel échouait à qualifier les Bleus pour le championnat d’Europe en 1988 puis se refusait à sélectionner Eric Cantona. Aux yeux du jeune attaquant marseillais, Henri Michel n’était « pas loin » d’être « un sac à merde », et l’expression restera attachée au nom du sélectionneur. Un désastreux match nul à Chypre (1-1), en match qualificatif pour la Coupe du monde 1990 – la France la ratera -, fut synonyme d’une fin acrimonieuse. Platini lui succédait sans plus de succès.

« Un bon vivant d’une grande sagesse »

« Outre sa carrière monumentale, Henri était un homme exceptionnel, a réagi auprès de l’AFP l’ancien numéro 10 des Bleus. Un ami d’une fidélité et d’une loyauté rares. Un compagnon avec lequel vous pouviez aller jusqu’au bout du monde sans jamais douter de son soutien et de sa présence. »

Par la suite, hors une courte expérience sur le banc du Paris Saint-Germain (1990-91), Henri Michel se détourna de la France, à moins que ce ne fut l’inverse. Le succès fut au rendez-vous : sous ses ordres, trois équipes africaines se qualifièrent pour la Coupe du monde. Le Cameroun (1994), le Maroc (1998) et la Côte d’Ivoire (2006) : il est le seul sélectionneur à avoir dirigé quatre équipes différentes dans la plus grandes des compétitions. Sa dernière expérience sur un banc fut le Kenya, pour six mois en 2012.

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« Henri Michel en tant qu’homme était un bon vivant, quelqu’un d’une grande sagesse, a réagi l’ancien attaquant ivoirien Bonaventure Kalou. C’était un meneur d’hommes. Il a su gérer les egos en sélection, où il y avait de fortes têtes. »

Sur RTL, l’ancien sélectionneur de l’équipe de France Michel Hidalgo avait fait pleuvoir les compliments : « Il était beau comme tout, il était gentil, agréable et intelligent, c’était un homme de qualité aussi bien dans ce qu’il savait faire dans le football et surtout comme ami. »

C’est à ce monument que les nantais rendront hommage ce 29 juin 2019, au moyen d’un  tournoi qui verra ressusciter des « rescapés », le tout dans la joie, mais dans le recueillement.

By AGM News

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