Le président russe ne lésine sur aucune démonstration de force pour impressionner les Occidentaux. Avec ces jours-ci, deux manœuvres d’une ampleur jamais vue depuis l’ère soviétique !
Les larges exercices militaires menés par la Russie en Méditerranée et en Sibérie signalent-ils le retour d’une menace comparable à celle que l’URSS faisait peser sur l’Europe avant la chute du mur ? Avec deux démonstrations de force presque simultanées, dans des régions éloignées des principales bases russes, Moscou entend montrer au monde entier une mobilité opérationnelle à laquelle Moscou n’avait plus habitué ses voisins.
Jamais la Russie n’a massé autant de navires et d’avions de guerre en Méditerranée, au large des côtes syriennes et tout autour de Chypre. Le « groupe de frappe », déployé depuis samedi et jusqu’au 8 septembre, comprend des navires provenant des flottes du Nord, de la Baltique, de la Mer noire et de la Caspienne, dont onze armés des tout nouveaux missiles de croisière « Kalibr ».
L’objectif affiché dans les médias russes est de dissuader les États-Unis, la France et la Grande-Bretagne de réaliser de nouvelles frappes contre le régime de Damas, comme ce fut le cas à deux reprises à la suite de bombardements à l’arme chimique. Les experts militaires estiment que l’objectif est plutôt d’impressionner la Turquie, protectrice des rebelles anti-Assad réfugiés dans la région d’Idlib. Une poche aujourd’hui à portée de canon des frappes russes… et de la menace du ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov pour qui « la situation à Idlib » n’est plus « tolérable ». Enfin, la démonstration de force est aussi un signal envoyé à l’Ukraine, avec qui les tensions montent dans la mer d’Azov.
Mais les moyens les plus impressionnants entreront dans la danse entre le 11 et le 15 septembre : 300 000 hommes mobilisés, soit une fois et demie l’ensemble des troupes régulières de l’armée française. Intitulé Vostok-2018 (Ouest-2018), l’exercice se déroulera en Sibérie et dans l’Extrême-Orient, avec une modeste participation des armées chinoises et mongoles. Il n’y a pas eu de manœuvres d’une telle ampleur depuis 37 ans et le dénommé Zapad-1981… à l’époque Brejnev, quand la guerre froide battait son plein entre Soviétiques et occidentaux.
Derrière l’Oural, la Russie ne compte que de faibles effectifs. L’exercice consiste donc en premier lieu à démontrer la capacité de la Russie à redéployer massivement ses forces sur un front éloigné. Notamment à l’aide de ses gigantesques avions de transports militaires. Dans le passé, cette incapacité avait coûté à la Russie une sévère défaite contre le Japon en 1905. Il y a des affronts qui, même un siècle plus tard, ne s’oublient pas en Russie…
Un budget de l’armée dopé depuis 2012
En 1981, l’URSS avait mobilisé 150 000 hommes à la frontière polonaise, déclenchant des sueurs froides au sein de l’OTAN, qui y voyait la répétition d’une possible invasion. « Il y aura comme un air de Zapad-81, mais en plus imposant d’une certaine manière », a commenté avec gourmandise Sergueï Choïgou, le ministre russe de la Défense.
Vostok-2018 doit aussi être comparé avec Zapad-2017, qui avait inquiété les pays Baltes, la Pologne et les Scandinaves. L’année dernière, Moscou avait annoncé le déploiement de 12 700 soldats, mais l’OTAN en avait compté… 100 000.
Vladimir Poutine s’emploie depuis 2012 à doper le budget de l’armée (5 % du PIB russe, contre moins de 2 % en France), symbole du retour de la puissance russe. Histoire de bien faire passer le message aux Européens et aux Américains, le maître du Kremlin assistera très probablement aux manœuvres.